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Ce qu’il faut retenir de la conférence Habitat III et du Nouvel Agenda urbain

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06 September 2017
Read time: 6 minutes

Si, quelque part et d’une manière ou d’une autre, vous avez entendu parler d’Habitat III et du Nouvel Agenda urbain, voici une brève présentation de ce que cela signifie concrètement pour l’avenir du développement urbain dans le monde.

Habitat III est la Conférence des Nations Unies sur le logement et le développement urbain durable, qui s’est déroulée à Quito, en Équateur, du 17 au 20 octobre 2016. Elle a rassemblé 30 000 personnes originaires de 167 pays. La conférence a redonné du souffle à l’engagement mondial envers une urbanisation durable et les États membres des Nations Unies ont adopté un Nouvel Agenda urbain, basé sur l’agenda d’Habitat II, qui s’est tenu à Istanbul en 1996.

URBACT était présent pour démontrer la nécessité, la valeur et l’importance d’une coopération territoriale et rappeler les points importants de la conférence et du Nouvel Agenda urbain.

Qu’est-ce que le Nouvel Agenda urbain ?

En bref, le Nouvel Agenda urbain est un document de 22 pages dont l’objectif est d’« orienter, pour les vingt prochaines années, le développement urbain durable et porteur de changements à travers le monde ». Le Nouvel Agenda urbain est un accord entre les différents États membres des Nations Unies, une vision partagée de l’avenir de nos villes et des engagements préliminaires en matière de développement urbain durable.

 

 

Une vision partagée

Cinq points, et de nombreuses sous-parties, décrivent une vision partagée des villes et des établissements humains pour tous, une vision dans laquelle « tous les habitants, sans aucune discrimination, peuvent créer des villes équitables, sûres, saines, accessibles, abordables, résilientes et durables, et y habiter ».

Cette vision inclut une égalité des droits et des chances, des libertés fondamentales, un logement approprié, un accès équitable aux biens publics pour tous, une participation et un engagement des citoyens, une égalité des sexes, une mobilité urbaine accessible, une gestion des sinistres et de la résilience, un environnement durable, une forte productivité, compétitivité et innovation, par la promotion du plein-emploi et d’un emploi productif ainsi que d’un travail décent pour tous.

 

Engagements

Dans le Nouvel Agenda urbain, les États membres se sont engagés à travailler sur :

  • l’insertion sociale et le traitement de la pauvreté
  • la prospérité urbaine et l’égalité des chances pour tous
  • un développement urbain durable et une résilience maîtrisée au niveau environnemental

 

Les États membres ont également défini les conditions d’une mise en œuvre efficace, comme la mise en place de cadres stratégiques au niveau local, national et infranational, un programme participatif, une coopération internationale, un renforcement des capacités et un partage des bonnes pratiques, des politiques et des programmes entre gouvernements à tous les niveaux, mais cela, sans aucun plan opérationnel, objectif ou indicateur à respecter pour les États membres ou autres décideurs politiques.

Alors que le document doit avoir une portée internationale, sa mise en œuvre n’est pas obligatoire. Cette mise en application dépend des engagements volontaires que les États membres et les parties prenantes seront prêts à prendre et à faire figurer dans le Plan de mise en œuvre de Quito.

Le Nouvel Agenda urbain est-il vraiment nouveau ?

C’est quelque chose de tout à fait discutable, puisque la réponse varie d’un contexte national et local à l’autre. Alors que pour certains, signer cet Agenda peut représenter une réelle avancée, pour d’autres, cette vision et ces principes sont déjà considérés comme acquis.

Dans le contexte européen par exemple, l’approche intégrée du développement urbain comprend déjà une longue liste d’initiatives, de politiques et de programmes de l’Union européenne tels que : URBAN I et II, qui se sont concentrés sur les quartiers en crise de 1994 à 2006 ; depuis 2002, le programme URBACT encourage le développement urbain intégré à travers une mise en réseau, un renforcement des capacités et un partage des connaissances entre villes ; les Accords de Bristol de 2005 sur l’importance des communautés durables pour le développement de l’Europe ; l’adoption de la Charte de Leipzig sur la ville européenne et durable de 2007 ; la Déclaration finale de la réunion de 2008, à Marseille, des ministres en charge du développement urbain, qui exige la mise en application des principes de la Charte de Leipzig en développant un Référentiel européen des villes et territoires durables (aussi connu sous le nom de RFSC) ; le Traité de Lisbonne de 2009, qui intègre la notion de cohésion territoriale ; la stratégie Europe 2020 et la politique de cohésion avec le Fonds européen de développement régional ; et plus récemment, le Pacte d’Amsterdam (30 mai 2016), qui définit officiellement l’Agenda urbain pour l’UE.

Ce désir constant de vouloir identifier, fixer et mettre en œuvre les principes, les moyens et les outils les mieux adaptés, témoigne de la complexité des problématiques, des défis et des possibilités liés à l’urbanisation, et de la volonté sans faille des décideurs politiques de protéger et de maintenir l’« Acquis URBAN » à l’heure de la crise économique et de l’émergence de nouvelles forces politiques extrêmes, de nouvelles orientations et de nouvelles décisions.

Le Nouvel Agenda urbain lui-même est le résultat de plusieurs mois de négociations entre les États Membres, et d’une série de concertations avec les principaux acteurs urbains dans le monde entier, au moyen de comités préparatoires, de rapports nationaux, régionaux et internationaux, de groupes politiques, de documents de travail, d’auditions et de réunions informelles, de réunions intergouvernementales, de réunions régionales et thématiques, de discussions en ligne, de forums sur les campagnes urbaines mondiales, et de bien d’autres choses encore ! Toute une préparation qui a débuté en septembre 2014, dont l’objectif était de rassembler autant d’acteurs urbains que possible à travers le monde, et de prendre en compte leurs avis dans ce qui est maintenant considéré comme le Nouvel Agenda urbain.

Ce qui est né de cette immense et admirable approche participative est un document inclusif, consensuel et objectif avec lequel n’importe qui faisant preuve de bon sens serait d’accord. Et c’est peut-être là l’une des faiblesses du Nouvel Agenda urbain ; le manque d’esprit non conformiste et créatif, l’absence de plan opérationnel, d’objectifs, d’indicateurs et de méthodes de travail, font de ce document une liste de souhaits bien plus qu’un agenda novateur et porteur de changements pour l’avenir.

Toutefois, malgré ses faiblesses et la critique que l’on peut faire du Nouvel Agenda urbain, nous devons reconnaître que cela a été un processus et un document fédérateur ainsi qu’un moyen de rappeler les valeurs que nous défendons et pour lesquelles nous nous battons à l’heure des défis économiques mondiaux, environnementaux et sociétaux.

 

Comment mettre en œuvre le Nouvel Agenda urbain ?

Depuis plusieurs années maintenant, des milliers de villes à travers le monde ont mis en œuvre les principes du Nouvel Agenda urbain et ont testé des solutions et des politiques. De nombreuses réponses et solutions existent déjà mais elles ne sont pas toujours connues à grande échelle.

C’est justement à ce niveau-là que la coopération territoriale peut jouer un rôle de catalyseur. La coopération, la mise en réseau et les échanges interrégionaux peuvent accroître, transmettre et transposer les bonnes pratiques et les politiques d’une ville à une autre. Pourquoi vouloir tout réinventer alors que les gouvernements nationaux et locaux peuvent s’inspirer des bonnes pratiques et des erreurs de leurs pairs ? Qu’elle soit régionale (par exemple paneuropéenne) ou internationale (par exemple entre des villes de différents continents), la coopération territoriale est le moyen pour les villes de se développer et, au final, de mettre en œuvre des politiques locales durables.

 

Prenons par exemple une ville comme Mollet del Vallès en Espagne, de 52 000 habitants. Lors de la conférence HABITAT III, Mollet del Vallès présenta la façon dont elle avait tiré profit des échanges avec d’autres villes européennes. Faisant partie du projet « Diet for Green Planet » du réseau URBACT avec les villes de Södertälje (Suède), Lomza (Pologne) et Moletai (Lituanie), la ville espagnole, qui n’avait pas la moindre expérience en matière de politiques sur la nourriture locale, décida de transposer la politique alimentaire de Södertälje qui consistait à distribuer de la nourriture saine, équilibrée, biologique, de saison et produite localement, à l’ensemble des cantines de la ville. Mollet del Vallès réunit des producteurs locaux, des enseignants, du personnel de cuisine, des diététiciens, des entreprises privées et des politiciens afin de discuter de la façon d’améliorer la qualité de la nourriture et les habitudes alimentaires des gens, tout comme l’a fait Södertälje. Ensemble, ils décidèrent de modifier le modèle d’approvisionnement public de la ville en ajoutant des clauses pour les entreprises qui distribuaient la nourriture aux cantines des établissements publics. Ces clauses comprennent des indicateurs et des objectifs : une nourriture saine, issue de l’agriculture biologique ; moins de viande et plus de légumes et de grains entiers ; une cuisine de saison ; des produits locaux ; une réduction des déchets alimentaires. La ville de Mollet del Vallès propose à présent une nourriture locale et une cuisine saine à l’ensemble des cantines des établissements publics de la ville, et participe à la relance de l’économie locale.

Voir la vidéo sur l’expérience de la ville de Mollet del Vallès dans URBACT Diet for a Green Planet (en espagnol, sous-titrée anglais) : Diet for a Green Planet – video from Mollet del Vallès

La ville de Basingstoke (RU) et la ville de Nantes (FR), également présents lors de la conférence HABITAT III, ont expliqué quels sont les avantages à faire partie d’un réseau urbain. Basingstoke, avec une population de 178 000 habitants, a décidé de rejoindre le réseau URBACT ESIMeC, pour réfléchir au moyen de faire correspondre les compétences de la population active locale aux besoins des employeurs. Suite à des réunions transnationales avec d’autres villes européennes, des conférences et d’autres rassemblements avec des acteurs locaux, des employeurs, des universitaires, du personnel municipal et la jeunesse, la ville de Basingstoke a acquis une réelle connaissance des besoins des entreprises et des compétences manquantes au niveau local. C’est ce qui l’a amené à créer la « Zone d’emploi et de compétences de Basingstoke », permettant d’adapter les formations et les enseignements proposés aux besoins du marché du travail local.

Voir la vidéo sur les résultats du projet ESIMeC (en anglais) : ESIMeC Cooking Lesson cooking up the right mix of skills for resilient city economies HD

Il ne s’agit là que de quelques exemples parmi des centaines qui démontrent l’impact positif de la coopération territoriale mise en place depuis 2002 par URBACT. Le programme de coopération territoriale européenne finance et rend possible le développement de politiques locales intégrées grâce à la mise en réseau, au renforcement des capacités et au partage des connaissances.

Au fil des ans, URBACT a su répondre à ces différents besoins qu’ont les villes de se mettre en réseau avec des pairs pour s’inspirer et apprendre les unes des autres, transposer et adapter de bonnes pratiques ; de renforcer les capacités des fonctionnaires et des élus locaux dans un programme participatif et dans la mise en œuvre de politiques ; d’une approche ascendante dans la conception et la mise en œuvre de politiques locales avec la création de groupes locaux ; et de l’utilisation du cadre de résultats pour contrôler et évaluer les conséquences et l’impact des politiques locales.

En s’appuyant sur les expériences d’URBACT et d’autres programmes de l’Union européenne, la Commission européenne a décidé de promouvoir, de renforcer et de financer une coopération entre villes au niveau international avec le tout nouveau programme international de coopération urbaine. À partir de juin 2017 et pendant au moins trois ans, la Commission européenne financera une mise en réseau méthodique entre des villes européennes et des villes du Mexique, de l’Argentine, du Brésil, du Chili, de la Colombie, du Pérou, du Canada, de la Chine, de l’Inde, du Japon et des États-Unis, dans le but de les aider à développer des politiques locales intégrées. Ce processus de planification d’actions devrait s’inspirer de la méthodologie et de l’expérience du programme URBACT.

Par ailleurs, la Commission européenne s’est également engagée à utiliser l’Agenda urbain pour l’UE pour alimenter le Nouvel Agenda urbain. Établi le 30 mai 2016 avec le Pacte d’Amsterdam, l’Agenda urbain pour l’UE, auquel contribue URBACT, se concentrera sur les 12 thèmes prioritaires suivants : les emplois et les compétences dans l’économie locale, la pauvreté urbaine, le logement, l’accueil des migrants et des réfugiés, l’exploitation durable des terres et les solutions fondées sur la nature, l’économie circulaire, l’adaptation au changement climatique, la transition énergétique, la mobilité urbaine, la qualité de l’air, la transition numérique et les marchés publics novateurs et responsables. Douze partenaires, tous chargés d’un thème et composés d’États membres, de villes et d’organisations de la société civile, auront trois ans pour élaborer des plans d’action afin d’améliorer la réglementation (plus efficace, plus efficiente et avec une mise en œuvre à moindre coût), les financements (plus adaptés aux besoins, accès simplifié et meilleure intégration) et les connaissances (données, bonnes pratiques/projets et partage d’expériences). D’autres thèmes transversaux devraient être abordés, tels que les petites villes et les villes moyennes, les liens entre les milieux urbains/ruraux ou encore les approches innovantes.

Enfin, la Commission européenne, avec le soutien de l’OCDE, s’est engagée à élaborer et à évaluer une définition mondiale et harmonisée de la ville et des établissements humains qui pourrait servir d’outil universel de mesure de l’urbanisation des villes.

Quelles suites pour Habitat III et le Nouvel Agenda urbain ?

Le Nouvel Agenda urbain prévoit déjà un suivi et une révision des engagements pris par les États membres, en lien avec la révision du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Ce suivi invite l’Assemblée générale des Nations Unies à faire un rapport sur l’état d’avancement de la mise en œuvre du Nouvel Agenda urbain, tous les quatre ans.

Cela peut s’avérer être un processus difficile, étant donné les différents engagements des États membres et l’absence d’objectifs et d’indicateurs urbains communs. D’un autre côté, cela peut déclencher des discussions sur la nécessité d’un cadre de résultats commun à tous les pays, espérons-le bien avant la quatrième Conférence des Nations Unies sur le logement et le développement urbain durable de 2036 et l’adoption d’un nouvel agenda.

URBACT continuera à suivre de près le processus et apportera son expérience, son expertise et son soutien en termes de mise en réseau des villes, de partage des connaissances et de renforcement des capacités des acteurs urbains, au sein et en dehors de l’Europe.

Vous pouvez voir des photos d’URBACT et d’HABITAT III en cliquant sur ce lien.